C’est la veille de la rentrée. Que dis-je… Pas « la » rentrée, mais bien « LA » rentrée. Certes, j’ai déjà changé d’appartements, de carrières, de pays, même d’habitudes ou d’aménagements intérieurs. Et même bien plus d’une fois dans ma vie. Les valises et les cartons, je connais. Ce n’est pas la première fois que je m’apprête à faire un saut dans l’inconnu, avec cette vague compréhension de ce qui est laissé en arrière et cette montée adrénaline, couplée d’appréhension, de stress, d’excitation et d’espoir, de ce qui apparaîtra dans l’après.
Et pourtant, aujourd’hui a une saveur particulière. Flux et reflux d’émotions surgissent, cohabitent puis se catapultent, tels des atomes surchargés cherchant à s’échapper de ce tube métallique froid trop étroit pour contenir cette énergie atomique. Il flotte en moi un arôme d’orange amère et de clou de girofle. Drôle de mélange… Ô combien désinfectant en spray pour l’intérieur de la maison. Cela dit, je nettoie mon intérieur, somme toute c’est donc plutôt approprié. Jean-Baptiste Grenouille n’a qu’à bien se tenir !
J’ai remplacé dans mes bibliothèques des livres professionnels (coaching, formation, Ennéagramme, créativité, développement personnel et autres contenus plus ou moins loufoques) ayant accompagné ces onze dernières années par des livres académiques. Méthodologie, épistémologie, sciences humaines, communication organisationnelle, sémiologie, philosophie, linguistique et autres nourritures intellectuelles enthousiasmantes.
Pour les chouchouter, je leur ai offert comme voisins de tablette de la littérature chère à mon cœur, des tragédies grecques aux incontournables poètes, en passant par la mythologie et autres chefs d’œuvres frissonnants ; caressant le doux et improbable espoir d’avoir du temps pendant les cinq prochaines années de lire pour le simple plaisir de se détendre les neurones et laisser les mots adoucir un bulbe hyperactif… O, but such a fool I am !
Ouste les classeurs administratifs, les dossiers de suivi clients, les manuels de formation. Bienvenus plans de cours, applications aux bourses, projet de recherche et autres contenus universitaires. Je me sens vraiment comme une enfant de 10 ans qui prépare son matériel scolaire la veille de la rentrée : bloc-notes, trousse, cartable, stylos, surligneurs… Il serait bon d’amener mon cerveau aussi, tant qu’à faire. J’ai même une carte étudiante (et les réductions associées).
Je vois partout autour de moi les parents accompagner leurs enfants, leur tenir la main, leur souffler à l’oreille que ça va bien aller, penser à eux toute la journée avec la hâte de les retrouver à la fin de la journée, et ce petit stress rempli de l’espoir que cela aie bien été pour eux. Je vois passer sur Facebook les photos de leur chenapans de dos, portant leur cartable, regardant leurs pieds sans oser se retourner pour dire un dernier au revoir, par peur d’échapper une larme peut-être ? Pincement de cœur.
Bonjour, je m’appelle Chloé, j’ai 41 ans et demain je reprends le chemin de l’école. Et pour une fois, j’aurais aimé que quelqu’un m’accompagne en me tenant la main… Oui, oui : comme une enfant arrivant en maternelle !