Message de Service

Pour celles et ceux qui ont encore un peu d’énergie pour lire une énième réaction aux évènements de cette semaine…

Et sinon : quand est-ce qu’on arrête d’être hypocritement hyper-sensible, hyper-susceptible et hyper-réactif à la moindre info ou déclaration publique ? Et surtout, quand est-ce qu’on arrête d’être incohérents ? Cela fait plusieurs jours que je bouillonne, au-delà du choc, de la tristesse, de la colère, de la peur (et de toutes autres émotions et sentiments liés directement aux évènements survenus en France depuis mercredi matin).

Dans ma définition personnelle, se clamer « Charlie » signifie d’abord et avant tout : « je suis un être humain et je suis pour la liberté d’expression, coûte que coûte et quel que soit le message exprimé ou la forme qu’il prend ». Pour en rajouter une couche, j’aurais même tendance à penser qu’un Charlie (version activiste) se battrait publiquement, quitte à prendre des risques, pour défendre ce droit fondamental de l’humanité. Cela s’appelle une opinion, un engagement, voire même un combat, non ? Apriori, l’Histoire nous montre que le monde est fait d’êtres humains qui ont une opinion (ou pas), qui s’engagent (ou pas) et qui combattent (ou pas).

Il n’y a pas qu’une seule définition de #JeSuisCharlie, et c’est tant mieux, au moins comme ça chacun peut mettre ce qu’il veut dedans, en fonction de ce qu’il souhaite apporter au monde, à son niveau et à sa mesure. Et c’est parfait ainsi. Mais justement, est-ce que chacun pourrait faire une pause et prendre du recul par rapport à son vécu émotionnel et instinctif ? Pour quoi faire ? Et bien pour réfléchir à ce que cela signifie pour soi, dans sa vie quotidienne et à partir d’aujourd’hui, de vivre dans ce monde, aujourd’hui, au milieu de toutes ces divergences et différences d’opinions, d’engagements et de combats ?

Oui, il y a eu de beaux élans humanistes, populaires, politiques, magnifiques, magiques, intenses, avec des licornes et des arc-en-ciel dedans, et que c’est bon, et que ça sent l’amour et la liberté. C’est top ! Mais à quoi bon si demain tout recommence, et si personne ne se pose des questions par rapport à soi-même dans un premier temps. Après tout, c’est plutôt sympa d’imaginer un monde où chacun apprend et évolue, dans le sens qu’il veut et au rythme qu’il veut, non ?

Quelles questions se poser ? Je n’en sais rien, chacun fait comme il le souhaite, mais moi je commencerai au hasard par : c’est quoi la liberté d’expression ? pourquoi est-ce un droit fondamental (ou pas) ? est-ce que je suis pour ? est-ce que je veux le défendre ? si oui, jusqu’à quel point et de quelle(s) manière(s) ? si c’est mon choix, comment puis-je devenir dans mes gestes du quotidien une graine de Charlie ? est-ce un combat que je veux mener ou bien je préfère ne pas m’engager (et j’en ai le droit) ou encore m’engager pour d’autres causes (et j’en ai le droit) telles que : les animaux, la planète, les enfants-travailleurs, les réfugiés de guerre, les sans domiciles fixes, le trafic d’êtres humains, la déforestation, un parti politique, une religion, etc.

De mon point de vue, il n’y a pas de sot combat, ni de combat qui soit trop petit ni trop grand. De mon point de vue, chacun fait comme il le peut, au moment où il le peut. De mon point de vue, on a autant le droit de s’engager que de ne pas s’engager du tout, en acceptant qu’il existe tout un spectre de couleurs entre ces deux positions extrêmes du tout ou du rien. De mon point de vue, on a le droit de choisir ses combats, de les assumer et de les promouvoir. De mon point de vue, on a le droit de tout, si on donne aux autres le droit à tout. Mais ça, c’est une position difficile à tenir 100% du temps, on peut se l’accorder. On s’est tous déjà retrouvés face à un discours, un évènement ou une opinion qui nous choquent, qui nous gênent ou qui nous touchent au plus profond de notre être, et surtout avec lesquels nous ne sommes pas d’accord. Mais que faire alors ? L’interdire ? Partir ? Tuer son auteur ? Ne rien dire ? Débattre ? Combattre ? Bref, je m’éloigne de mon propos.

Au minimum, si on se déclare « défenseur de la liberté d’expression », alors arrêtons de nous offusquer du moindre blabla qui serait en dehors de notre propre vision de ce qui est bien ou mal dans une approche purement dichotomique de la vie. Ou bien, ne nous déclarons pas défenseur de ce droit, et là oui : lâchons-vous avec ferveur, véhémence et violence envers les déclarations que les Dieudonné, les Le Pen & Co., les Bedos de ce monde, parce qu’ils n’auraient pas le droit de dire ce qu’ils souhaitent dire.

Si vous pensez sincèrement que les caricaturistes de Charlie Hebdo avaient le droit fondamental de dessiner ce qu’ils dessinaient, sans devoir mourir pour cela, alors à partir d’aujourd’hui vous devriez participer à la création d’un nouvel espace public où règne le droit infini et inaliénable à la liberté d’expression. Ne vous en déplaise si toutes les déclarations médiatiques n’entrent pas dans votre propre carte du monde, voire vous mettent en colère ou vous paraissent abjectes.

Mais au lieu de s’observer soi-même, de se positionner soi-même, de se poser des questions à soi-même, quitte à en parler ou en débattre publiquement ou pas (de mon point de vue, on a le droit aussi à avoir des opinions privées sur lesquelles on refuse de communiquer), il est devenu bien plus facile d’être bien pensant à jugeant, critiquant et montrant du doigt les autres. Quelque part, je me dis que si l’on devenait chacun son propre prophète, déjà on apprendrait à mieux s’assumer soi-même, à plus s’aimer soi-même, et ainsi devenir plus bienveillant, tolérant et aimant également envers les autres.

J’ai beaucoup hésité à écrire quelque chose. Parce que je sais que le sujet est sensible, et pourrait être mal interprété. Car oui, depuis mercredi, on est #JeSuisCharlie ou on est #JeNeSuisPasCharlie, et le combat entre les deux fait rage. Pas d’entre deux, pas de possibilité d’émettre une opinion qui n’irait pas dans le sens des bisounours, de l’accueil inconditionnel de l’autre et de l’amour universel. Là, vous la voyez l’incongruence qui me fait bouillonner ? Tu parles d’une pression sociale société qui autorise la liberté de penser et de s’exprimer !

Cette approche manichéenne, où ne coexistent que the bien et the mal est justement celle sur laquelle se basent les principales religions, à grand renfort de paradis et d’enfer, de dieux et de diable, de pour ou de contre, de croyant ou de non croyant, de péché ou de vertu, etc. Créant des valeurs supposément universelles, mais surtout que l’on ne doit ô grand jamais remettre en question. De mon point de vue, l’humanité gagnerait à devenir plus nuancée, mais surtout à accepter que chacun est libre de ses choix, de ses déclarations, de ses combats.

J’ai également hésité à écrire quelque chose parce que chacun y était déjà allé de sa participation et que je n’avais pas forcément envie de participer. Puis je me suis rappelée de ce que j’avais justement envie de transmettre comme message : j’ai le droit de dire ce que je veux (je suis moi), et vous avez le droit de réagir comme vous le voulez (tu es toi), et surtout : chacun a le droit de continuer à vivre sa vie comme il l’entend, quitte à continuer à être incongruent et heureux 😉 En conclusion : faites comme bon vous semble, si possible en étant conscient de vos choix, de vos opinions et de vos combats. De mon point de vue, et même si c’est à plus ou moins grande échelle, nous impactons toutes et tous le monde dans lequel nous vivons, au travers de notre existence et que nous soyons vivants.. ou morts.

#Merci #Bisous

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