Je suis fatiguée… Je suis fatiguée de vivre dans un monde où l’être humain moderne, de par sa nature, de par ses comportements, de par son existence même, est plus orienté vers la destruction, la mort et la violence, que vers la création, l’amour ou la paix. Un monde où nous ne voyons plus rien, ni soi, ni les autres. Un monde où l’on peut découvrir un itinérant mort en promenant son chien, sans que personne d’autre ne s’en soit aperçu. Un monde aveugle.
Je suis frappée… Je suis frappée par la quantité de micro-agressions vécues et infligées aux autres et à soi-même au quotidien, de manière anodine, anonyme et invisible. Ces mots, ces gestes, ces comportements (ou leur absence) qui ont l’effet d’une bombe H(umaine). L’humain est une arme de destruction massive. Je vois des coups, des cris, du mépris, du silence. Serions-nous tous des kamikazes ? Allons-nous d’implosions en explosions, sans réaliser les dommages collatéraux de nos propres errances ?
Je suis agacée… Je suis agacée par le manque de courage individuel, par cette incapacité latente à oser se regarder dans le miroir, les yeux dans les yeux, pour s’observer, reconnaître, assumer, accepter et embrasser ce qui fait de soi, soi. Nous accusons facilement et rapidement les autres de nous infliger des souffrances, mais nous nous en infligeons tout autant à nous-mêmes.
Je suis outrée… Je suis outrée par la violence latente. Pas besoin d’avoir une arme pour être violent. Des actes terroristes ont lieu au quotidien, en nous et autour de nous, qu’ils soient verbaux, intellectuels, comportementaux, psychiques, psychologiques, politiques ou physiques. Nous sommes devenus terroristes les uns des autres. Moqueries, harcèlements, stéréotypes, jalousies, vols, brutalités, jugements… Est-ce sans fin ?
Je me pose la question : où est l’amour ? L’amour de soi et l’amour d’autrui. Dans toutes nos différences et toutes nos splendeurs, individuelles, uniques, merveilleuses. Quand avons-nous perdu cette capacité à vivre ensemble, à se respecter, à se comprendre, ou au moins à tolérer l’existence des multiples spectres identitaires qui constituent l’humanité ?
On entend souvent parler de nos trois instincts naturels : survie, reproduction, socialisation ; ceux-là même qui dicteraient notre existence. Notre belle société occidentale, supposément évoluée, a misé sur des politiques économiques de pénurie et de rareté des ressources (scarcity). On tente donc de survivre, aux dépend des autres. Moi, j’ai envie de croire en l’abondance des ressources.
Laissez-moi rêver encore un peu avant de me taxer de bisounours, romantique, utopiste et déconnectée de la réalité de la vie. Laissez-moi croire que nous sommes plus puissants que nous ne le pensons. Laissez-moi découvrir que nous sommes encore capables d’Amour. Laissez-moi m’évader encore quelques instants dans ce monde imaginaire, bercée par l’illusion fondamentale que l’être humain a la capacité intrinsèque, la volonté farouche et l’activité débordante de viser le mieux, le bien, le bon.
Je rêve éveillée… Je suis fatiguée…